L.A, ses rues sombres dans la nuit, ses va-et-vient incessants, sa foule disparate, ses quartiers huppés ou populaires, ses immeubles et ses villas sur les collines… Ici, depuis le toit d’une sombre bâtisse, la vision portait loin malgré la fine brume de la soirée. Ce regard dirigé dans une direction bien précise fut attiré vers une dame, brune, habillée sobrement, au retour de son lieu de travail.

Cela faisait un moment que cette personne était surveillée. Déjà, un dossier sur elle avait été fournit, indiquant ses activités, aussi bien celles de sa couverture que d’autres moins évidentes. Ensuite, par pur professionnalisme, des renseignements avaient été pris, avec filature discrète (ce qui ne fut pas une mince affaire, et très vite mise de coté pour ne pas se faire repérer), un petit profil de ses contacts et relations… Et le tout venait à perturber la jeune thaï.

Wila allait avoir à faire avec elle. Elle avait un devoir à accomplir, et après une longue période d’observation, à trouver des réponses à de nombreuses questions techniques et morales, définir un mode opératoire, sa décision était prise. Elle savait ce qu’elle avait à faire et comment le faire, mais, cela se passerait il comme prévu ?

Pour le moment, elle attendait que la belle regagne son domicile, un petit appartement, juste en haut de la rue en face de son poste d’observation. Wila s’était postée là exprès, cachée entre deux éléments de climatisation sur ce toit. Pour le moment, elle suivait le trajet de la brune et son acolyte, un grand brun à la mine taciturne. Celui-ci la raccompagna jusqu’à chez elle, et poursuivit sa route pendant que sa patronne rentrait : parfait, elle serait donc seule, comme la plupart du temps le soir quand elle ne sortait pas pour affaire.

Wila agirait ce soir. Elle guetterait depuis son autre poste d’observation les activités de la dame russe. Donc, elle regagna le filin qu’elle avait accroché, parvint à l’escalier de secours de cet immeuble, et son sac sur l’épaule, fit à pied le trajet vers sa seconde planque.
De là, non seulement elle aurait une vue sur les pièces principales de l’appartement de la dame, ce qui lui permettrait de savoir quand agir, mais en plus, elle pourrait atteindre le toit de l’immeuble où il se trouvait à l’aide d’un simple saut au dessus d’une ruelle étroite suivit d’une petite marche sur les toits.

Au moment où la russe irait prendre sa douche, d'une durée moyenne connue, Wila prendrait son élan, se faufilerait comme prévu, en tenue sombre dans la nuit, de toits en toits entre les souffleries, motorisations d’ascenseurs, cuves d’eau et autres jusqu’à celui qui lui permettrait, grâce à la porte de service, d’entrer dans l’immeuble et gentiment aller à la porte de l’appartement. Ou encore de descendre avec un autre filin pour passer par une fenêtre, selon la facilité d’accès.

Et là…il fallait y aller. Vite !

En fait, elle choisit la seconde solution : elle n’était pas assez douée pour crocheter les serrures. Alors que passer une fenêtre… c’était bien plus rapide et aisé. Son chronomètre lui indiquait qu’elle était dans les temps : suspendue le long du mur, elle découpa un cercle de verre dans la vitre, ouvrit la fenêtre et se faufila dans le salon. Heureusement que son employeur lui avait fournit de bons outils… maintenant, elle allait sortir les siens. Sa main se porta à son holster, elle s’accroupit dans un recoin et attendit. La fenêtre fut fermée, les rideaux tirés.

Au coin d’un bureau plein de papiers, de livres –dont un ouvert- et d’une immense bibliothèque encombrée de livres bien rangés et quelques babioles, Wila tâta un fauteuil confortable, en face de la porte de la chambre par laquelle sortirait la brune. Un ordinateur en veille attendait en ronronnant. Le ménage était fait, chaque chose bien à sa place.
La petite thaï alla se placer. Elle se mit exprès dans un angle mort, le long d’un mur encombré de dessins d’enfants accrochés dessus, son arme prête à l’emploi. De la salle de bain, les sons indiquaient que la jolie russe avait fini de se laver. Une odeur d’agrumes la précéda dans la pièce.

Wila se tenait silencieuse, prête à l’action. Pas le droit à l’erreur, pas de seconde chance. Mais elle était détendue. Son souffle se faisait inaudible sous sa cagoule. Ses jambes si particulières étaient capables de la projeter n’importe où dans la pièce, son flingue prêt à cracher du plomb, son sang bouillonnait. Encore trois, deux, un pas… et elle serait là. Anastasiya.